Nouvelle piste pour le traitement des troubles anxieux: Découverte d’un important mécanisme de connexion des cellules cérébrales

Nouvelle piste pour le traitement des troubles anxieux: Découverte d’un important mécanisme de connexion des cellules cérébrales

De gauche à droite: Dr Hideto Takahashi et Husam Khaled  

De nouveaux travaux menés par l’équipe du Dr Hideto Takahashi, directeur de l’Unité de recherche en développement et plasticité des synapses à l’Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM), ont mis au jour le rôle particulier que joue un certain complexe protéique dans l’organisation structurelle et la connexion des synapses ainsi que dans l’apparition de comportements cognitifs bien précis. Ces travaux ont fait l’objet d’un article publié récemment dans le prestigieux EMBO Journal et corédigé avec l’équipe du Dr Steven Connor, de l’Université York, et l’équipe du Dr Masanori Tachikawa, de l’Université de Tokushima. Le Dr Takahashi est également professeur-chercheur agrégé à la Faculté de médecine de l’Université de Montréal.

Les maladies mentales, telles que les troubles anxieux, l’autisme et la schizophrénie, figurent parmi les principaux problèmes de santé au Canada et ailleurs dans le monde. Malgré leur prévalence, ces maladies s’avèrent difficiles à traiter, la découverte de nouveaux médicaments étant freinée par la complexité du cerveau. Il est donc essentiel de démystifier les mécanismes à l’origine des troubles cognitifs pour faire évoluer les stratégies thérapeutiques.

On appelle « synapses » les points de jonction entre les cellules cérébrales (les neurones), ces relais indispensables qui assurent la transmission des signaux neuronaux et le bon fonctionnement du cerveau. En cas de dysfonctionnement, les synapses excitatrices – qui activent la transmission des signaux aux neurones cibles – et les molécules synaptiques prédisposent à plusieurs maladies mentales. L’équipe du Dr Takahashi a découvert précédemment un nouveau complexe protéique au sein de la transmission synaptique, qui est appelé « TrkC-PTPσ » et qui ne se trouve que dans les synapses excitatrices. Les gènes codants pour TrkC (NTRK3) et PTPσ (PTPRS) sont associés respectivement aux troubles anxieux et à l’autisme. On ignore toutefois par quels mécanismes ce complexe régit le développement des synapses et intervient dans les fonctions cognitives.

Les travaux d’Husam Khaled, auteur principal de l’étude et doctorant au laboratoire du Dr Takahashi, révèlent que le complexe TrkC-PTPσ régit la maturation structurelle et fonctionnelle des synapses excitatrices en contrôlant la phosphorylation, un processus biochimique qui modifie l’activité de nombreuses protéines synaptiques. Or, chez la souris, le dérèglement de ce complexe entraîne certaines anomalies comportementales.
 
Pour aller plus loin
Les neurones sont les éléments constitutifs de la matière grise et du système nerveux. Ils sont responsables de la transmission et de la réception des signaux qui permettent au cerveau et à l’organisme de fonctionner. Les neurones voisins communiquent par l’intermédiaire de synapses, qui agissent comme des passerelles permettant l’échange de signaux. Ce processus est essentiel au bon fonctionnement du cerveau, notamment à l’apprentissage, à la mémoire et à la cognition. Le dysfonctionnement des synapses ou de leurs composants peut toutefois rompre la communication entre les neurones et occasionner divers troubles cérébraux.

En étudiant des souris porteuses de certaines mutations génétiques qui désorganisent le complexe TrkC-PTPσ, le Dr Takahashi et son équipe ont découvert le rôle particulier que joue ce dernier. Comme ils l’ont démontré, ce complexe régule la phosphorylation de nombreuses protéines impliquées dans la structure et l’organisation des synapses. Des images à haute résolution du cerveau des souris ont permis de déceler une anomalie dans l’organisation des synapses. Un examen plus poussé de leurs propriétés de signalement a révélé une augmentation des synapses inactives qui acheminaient mal les signaux. Dans le même temps, l’observation du comportement des souris a révélé une forte anxiété, plus particulièrement une exacerbation du comportement d’évitement dans des conditions peu familières ainsi que des troubles de comportement social.

Pourquoi est-ce important?
Si la désorganisation des synapses est liée à de nombreux troubles neuropsychiatriques, les mécanismes responsables de ce phénomène restent encore méconnus. Les travaux du Dr Takahashi mettent en lumière le rôle que joue le complexe moléculaire TrkC-PTPσ dans l’organisation des synapses et les mécanismes de phosphorylation des protéines. Considérant le lien avec plusieurs troubles neuropsychiatriques, ces résultats ouvrent la voie à des pistes thérapeutiques prometteuses.
 

« Cette étude comporte deux volets importants, explique le Dr Takahashi. D’une part, elle révèle de nouveaux mécanismes de connexion moléculaire entre les cellules du cerveau. D’autre part, elle nous permet d’élaborer un nouveau modèle animal des troubles anxieux apparentés au trouble panique et à l’agoraphobie, ce qui nous aide à mettre au point de nouvelles stratégies thérapeutiques. »

 
Pour en savoir plus, consultez l’article complet (en anglais) au  www.embopress.org/doi/full/10.1038/s44318-024-00252-9.

Mentions
Cette étude a été rendue possible grâce au soutien financier du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG), des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), du Fonds de recherche du Québec (FRQS) et des National Institutes of Health (NIH). Husam Khaled a bénéficié pour cette étude d’une bourse de doctorat du FRQS et d’une bourse de doctorat Emmanuel-Triassi de l’IRCM. 

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